Le karma est-il ce que l’on croit ?

C’est ce truc qui fait le tour de la terre et qui revient te frapper par derrière” me dit mon amoureux, que j’ai interrogé l’air de rien à l’occasion de cet article. Le karma, c’est comme un boomerang : ce qui part de toi reviendra vers toi. A quel moment, et dans quelles circonstances ? Nul ne peut le prédire.  

En Occident, la théorie du karma nous est familière. Dans le milieu du yoga, elle est même plutôt populaire. On la perçoit comme un genre de justice cosmique qui finit toujours par nous rattraper pour nous forcer à récolter ce que l’on a semé, le bon comme le mauvais. D’où vient le karma ? Est-il vraiment ce que l’on croit ? Et d’ailleurs, quel rapport avec le yoga ?

Qu’est-ce que le karma ?

Le terme sanskrit karman dérive de la racine kṛ, « faire » ; cette racine est apparentée à notre français « créer ». Le karma, ou karman, désigne l’action. À ne pas confondre avec le mot kriya, formé sur la même racine, qui désigne l’activité (c’est-à-dire les étapes ou les efforts dans l’action); étymologiquement, le karma est donc l’action exécutée, conséquence de notre activité.

Dans les plus anciennes parties du Veda, textes sacrés composés il y a environ 3500 ans, le karma, fidèle à son sens étymologique, désigne l’action, et plus particulièrement l’Action avec un grand A, à savoir l’action rituelle : le sacrifice aux dieux. Le karma est alors quelque chose de positif : le sacrifice est l’action qui permet de maintenir le bon ordre cosmique. L’acte est valorisé, car il pourvoit aux besoins des dieux et des humains.

Quelques siècles plus tard, au début du 1e millénaire avant notre ère, le karma ne désigne plus seulement l’action : il désigne l’action qui engendre une réaction. Et voilà établie la chaîne de causalité qui mène à la « loi de rétribution des actes », à savoir le karma tel qu’on l’entend. Et lorsque, plus au moins à la même époque, se répand la croyance au cycles des renaissances (le fameux samsāra) , le karma, qu’il soit bon ou mauvais, ne devient plus du tout désirable.

Karma et samsāra 

Le postulat de base est le suivant : chaque action engendre une réaction. Chaque action porte des « fruits ». Ces fruits vont mûrir : certains très rapidement, d’autres très lentement. Lorsqu’ils arrivent à maturité, on récolte les conséquences de nos actes passés. Mais au moment de notre mort, certains des germes plantés par les actions effectuées à chaque instant de notre vie n’ont pas encore mûri. Or, l’univers est comme nous : il n’aime pas tellement les fruits verts. Ce sont ces fruits non mûrs qui obligent l’ātman (le Soi, qu’on pourrait traduire par âme) à transmigrer vers une nouvelle vie, afin de permettre aux fruits de nos actes de se déployer. Attention à ne pas confondre transmigration et réincarnation : ce n’est pas “nous” qui renaissons, selon la pensée hindoue. Ce n’est pas moi qui me réincarne ; ce ne sont pas ma personnalité, mes souvenirs et mes désirs. C’est l’ātman, un noyau spirituel indestructible, libre de tout lien, indifférent à la peine comme au plaisir, qui transmigre d’une existence à l’autre.

Karma et cycle des renaissances sont donc intimement liés. L’acte se trouve à la source du cycle des renaissances. Le karma, résidu de nos actions, est ce qui fait tourner la roue du samsāra.

Bien sûr, des actions « bonnes », c’est-à-dire conformes à l’ordre cosmique, mèneront notre ātman dans une naissance future plus agréable. Mais ce que l’on veut (ce à quoi aspire toute spiritualité indienne), c’est, à plus ou moins long terme, dans cette vie ou dans mille vies, libérer l’ātman. Cesser de renaître. Échapper à la transmigration. C’est la Libération, nommée selon les traditions moksha, nirvāna, ou kevala.

Car la perspective de renaître indéfiniment n’a rien de réjouissant. Des vies infinies ne sont pas perçues comme les promesses d’expériences nouvelles ou la possibilité de progrès spirituels : elles sont vaines. Pour échapper au cycle des renaissances, porteuses de souffrance, il y a une seule solution : il faut éradiquer le karma. Il faut non seulement brûler les germes des fruits non encore mûris, mais il faut s’abstenir d’en produire de nouveaux, afin qu’au moment de notre mort, notre balance karmique soit à zéro.

Ni bon karma, ni mauvais. Zéro karma.

Et, tadam !, c’est ici que le yoga intervient. Le yoga est originellement une méthode de résorption du karma. Ou plutôt, des méthodes, car il y en a des tas.  

Mais ça, c’est une autre histoire.


Le karma est une loi impitoyable, puisque mécanique. Pas de moralité, ni d’éthique, dans ce concept neutre. Pas de jugement divin, qui autoriserait une certaine compassion, ou du moins une certaine indulgence en fonction de nos intentions. Pas de jugement dernier non plus. Le karma n’est pas la somme finale des bonnes et des mauvaises actions : le karma se crée et se résorbe à chaque instant de notre vie. Selon la pensée indienne, nous nageons dans l’océan des conséquences de nos actions passées. Parfois même très passées : celles d’une autre vie.

4 réflexions sur “Le karma est-il ce que l’on croit ?”

  1. Bonjour, merci je commence à comprendre le karma et les vies antérieure. Je lis un livre de Sandrine muller bohard qui m’apprend beaucoup. Je vous remercie de ce que vous faites… Belle journée

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